Retour sur l’événement organisé par l’Aisccuf dans le cadre du Sommet de la Francophonie
Dans le cadre du XIXe Sommet de la Francophonie, l’Aisccuf a organisé, le 4 octobre 2024 à Paris, au siège de la Cour des comptes, un événement international francophone sur le thème des relations des ISC avec les citoyens et les médias.
Cet événement s’inscrivait dans le prolongement du dernier TOP Congrès, qui s’est déroulé à Yaoundé et était labellisé par le Festival de la Francophonie.
Le thème retenu, celui des relations des ISC avec les citoyens et les médias, est en lien avec notre « Déclaration de Bruxelles sur les engagements de l’Association à l’égard des valeurs de la Francophonie ». L’action de l’Aisccuf s’inscrit en effet directement dans deux des quatre missions de la Francophonie : la promotion de la démocratie et l’appui à la formation. Plus directement, le cinquième engagement pris par l’Aisccuf est d’aider les ISC francophones à renforcer leurs relations avec les citoyens et la société civile.
Cet événement a été ouvert par le Premier président, Pierre Moscovici, en tant que secrétaire général de l’Aisccuf. Il a insisté, dans son discours d’ouverture, sur l’engagement pris par l’Aisccuf pour aider les ISC à renforcer ces relations avec leurs parties prenantes, ainsi que sur le fait « qu’à l’heure où la désinformation se développe et où la crise démocratique est de plus en plus marquée, les ISC se doivent d’être un tiers de confiance, une véritable boussole pour le citoyen et le décideur public ».
Mamadou Faye, président de la Cour des Comptes du Sénégal et président en exercice de l’Aisccuf, au pupitre lors de son allocution introductive.
Deux tables rondes ont rassemblé 17 ISC membres de l’Aisccuf et plusieurs experts internationaux sur le thème des relations des ISC avec les citoyens et avec les médias.
De gauche à droite, au premier rang : Papa Gallo Lakh, secrétaire général de la Cour des Comptes du Sénégal, Anastasie Lucie Adja, présidente de chambre à la Cour des Comptes de Côte d’Ivoire, Rosario Mbasogo Kung Nguidang, Première présidente de la Cour des comptes de la Cemac, Ismahan Mahamoud Ibrahim, Première présidente de la Cour des comptes de Djibouti, Sotiria Ntouni, Première présidente de la Cour des Comptes de la République hellénique, Mamadou Faye, président en exercice de l’Aisccuf, Premier président de la Cour des Comptes du Sénégal, Kanvaly Diomandé, Président de la Cour des Comptes de Côte d’Ivoire, Générose Kiyago, présidente de la Cour des comptes du Burundi, et Michèle Odette Andrée Carrena Adossou, présidente de la Chambre du contrôle et du jugement des comptes des collectivités locales de la Cour des comptes du Bénin.
Lors de la première table ronde, des experts internationaux ont exposé les résultats d’enquêtes qui évaluent la stratégie de communication et identifient les bonnes pratiques des ISC dans leur relation avec les citoyens :
Freddy Ndjemba, chef de projet senior au département gouvernance des ISC de l’Initiative pour le Développement de I’Intosai (IDI), a présenté le rapport mondial d’inventaire des ISC, soulignant que si 86 % des ISC francophones d’Afrique communiquent avec les autorités auditées, seulement 53 % interagissent avec le Parlement et 20 % avec la société civile.
De gauche à droite : Freddy Ndjemba, chef de projet senior au département gouvernance des ISC de l’Initiative pour le Développement de I’Intosai (IDI), Hakim Khellaf, secrétaire général adjoint de la Cour des comptes, Christophe Rappe, conseiller, membre du collège de la Cour des comptes de Belgique, YAP Abdou, président de la Chambre des comptes du Cameroun, Djibril Badiane, chargé de programme senior à l’International Budget Partnership (IBP).
La transparence budgétaire reste néanmoins un défi, notamment en Afrique comme l’a souligné Djibril Badiane de l’International Budget Partnership (IBP). L’absence de transparence et de communication a été particulièrement criante pendant la pandémie de Covid-19, où peu d’informations ont été transmises concernant l’efficacité des aides d’urgence.
Les représentants des ISC ont ensuite tour à tour partagé les initiatives et bonnes pratiques de leur institution. Le Secrétaire général adjoint de la Cour des comptes de France, Hakim Khellaf, a lui-même présenté les initiatives de la Cour pour renforcer le lien avec le citoyen, notamment la mise en place d’une plateforme citoyenne et d’une plateforme de signalement, la création d’une direction des relations institutionnelles et citoyennes ainsi que la diffusion publique de 100 % des publications.
Christophe Rappe, conseiller et membre du collège de de la Cour des comptes de Belgique, a souligné le rôle central de son institution dans la communication avec les citoyens et le Parlement, en soulignant qu’en tant qu’institution fédérale, la Cour répond à pas moins de huit parlements. Il a également expliqué comment son ISC s’engage à rendre ses rapports accessibles à tous, en publiant dans les langues nationales et en utilisant des infographies pour faciliter la compréhension. Par ailleurs, elle a développé un outil en ligne, le « monitor« , qui permet de suivre l’état de mise en œuvre de ses recommandations.
Enfin, YAP Abdou, président de la Chambre des comptes de la Cour Suprême du Cameroun, a mis en lumière la jeunesse et l’indépendance récente de cette institution tout en expliquant comment elle cherche à renforcer sa proximité avec les citoyens, en assurant une meilleure communication sur la gestion des finances publiques. Le rapport public annuel, critiqué et examiné par les journalistes et le public, est un élément central de cette démarche. Deux fois par an, la Chambre organise des rencontres avec le Parlement pour répondre à des questions spécifiques.
La communication avec les médias a fait l’objet de la deuxième table ronde, introduite par Bianca Brétéché, directrice adjointe du programme Sigma de l’OCDE. Elle a exposé les résultats d’une enquête menée auprès de 22 ISC sur leurs pratiques dans le domaine de communication, et insisté sur les justifications à l’engagement des ISC envers les médias, ainsi que sur les bonnes pratiques en la matière.
Au pupitre, Bianca Brétéché, administratrice à l’OCDE et directrice adjointe du programme Sigma, puis de gauche à droite : Ismahan Mahamoud Ibrahim, Première présidente de la Cour des comptes de Djibouti, Mamadou Faye, président de la Cour des Comptes du Sénégal et président en exercice de l’Aisccuf, Sotiria Ntouni, Première présidente de la Cour des Comptes de la République hellénique, et Kanvaly Diomandé, Président de la Cour des Comptes de Côte d’Ivoire.
Ismahan Mahamoud Ibrahim, Première présidente de la Cour des comptes de Djibouti, a expliqué comment son ISC s’efforce d’être en adéquation avec les valeurs des ISC et avec les principes fondateurs de l’Intosai en matière de communication. Elle a ensuite évoqué les défis auxquels son institution doit faire face, en l’absence de service communication dédié.
En Côte d’Ivoire, comme l’a expliqué le Président Kanvaly Diomandé, la Cour des Comptes a récemment renforcé ses relations avec la presse, conformément au Code de transparence en vigueur, tout en restant vigilante quant à l’impact des rapports lorsqu’ils sont publiés et en insistant sur la nécessité de faire de la pédagogie sur les notions comprises dans les rapports.
Ismahan Mahamoud Ibrahim, Première présidente de la Cour des comptes de Djibouti, et Mamadou Faye, président de la Cour des Comptes du Sénégal et président en exercice de l’Aisccuf.
Quant au président en exercice de l’Aisccuf, Premier président de la Cour des Comptes du Sénégal, Mamadou Faye, il a donné l’exemple du rapport sur l’exécution des lois de finances, qui est désormais publié sur le site internet et permet ainsi à l’ensemble des parlementaires d’en prendre connaissance. Il a enfin insisté sur la nécessité de communiquer et sur le risque qu’il y aurait, pour une ISC, à ne pas le faire.
La Cour des comptes hellénique, qui participait pour la première fois à un événement de l’Aisccuf depuis son adhésion à l’Association, était représentée par sa Première présidente, Sotiria Ntouni. Celle-ci a insisté sur l’importance de la communication « entre la Justice et les citoyens », pour garantir la confiance de ces derniers envers celle-ci. Elle a insisté sur la nécessité de communiquer avec les médias, y compris pour les décisions juridictionnelles, et sur l’importance du bureau de communication et de presse, en charge de cette fonction.
De gauche à droite : Mamadou Faye, président de la Cour des Comptes du Sénégal et président en exercice de l’Aisccuf, Sotiria Ntouni, Première présidente de la Cour des Comptes de la République hellénique, et Kanvaly Diomandé, Président de la Cour des Comptes de Côte d’Ivoire.
Enfin, Zineb El Adaoui, Première présidente de la Cour des comptes du Royaume du Maroc, qui a participé aux débats en visioconférence, a présenté la stratégie et la pratique de son ISC en matière de communication et notamment insisté – au-delà des principes, essentiels et du cadre réglementaire, déterminant, qui permettent à une ISC d’exercer ses prérogatives en matière de communication – sur l’importance de disposer d’un véritable pôle de communication pour professionnaliser la fonction et de former les magistrats à la communication avec les médias.
Zineb El Adaoui, Première présidente de la Cour des comptes du Royaume du Maroc.
Cet événement a confirmé que les ISC, vigies de la transparence financière et de la bonne gouvernance, doivent s’engager davantage dans un dialogue ouvert avec les citoyens et les médias. La professionnalisation de la communication et l’adaptation aux nouveaux outils numériques sont des pistes prometteuses pour renforcer leur impact et garantir la confiance du public.
Dans son discours de clôture, Natacha Rimbon, directrice des relations internationales, de l’audit externe et de la Francophonie, a rappelé qu’il y a « un lien indissociable entre l’indépendance des ISC – principe affirmé dès Lima en 1977 – et leur faculté de communication – qui constitue dans la Déclaration de Mexico de 2007 deux des huit principes énoncés : le droit et l’obligation de faire rapport sur leurs travaux, d’une part ; la liberté de décider du contenu et de la date de leurs rapports de contrôle, de les publier et de les diffuser, d’autre part ».